mercredi 7 avril 2010

Les fleurs d'Irlande

Dédié à Ariane, la plusse belle du monde

La petite Eireen se promenait allégrement dans un magnifique champ vert, parsemé de collines et de mottes de gazon rousses telles que l'on en retrouve seulement dans les belles îles du Nord. La plus jeune du clan Monaghan aimait se retrouver seul sur cette terre sauvage, entre un ciel sévère et un sol ébouriffé. Elle se plaisait à admirer les rares oiseaux qui, comme elle, profitait de cette solitude paisible. Cependant, en cette journée précise, elle avait entamé sa promenade avec une idée derrière la tête: elle voulait trouver une fleur bleue.

En fait, c'est une demande que sa mère lui avait faite: "Eireen, va me chercher une fleur bleue..." La jeune fille avait reconnu dans la voix de sa mère une certaine angoisse. Il est vrai que son père, qui élevait du bétail dans la région, n'était pas rentré depuis un certain temps; pas plus que son frère, l'aîné des Monaghan. En s'éloignant de la hutte familiale, elle avait aussi remarqué quelques hommes, chaudement habillés pour la saison, qui semblaient aller vers sa maison; dont un en particulier qui tenait une hache pour fendre le bois. De plus, elle se rappelle s'être demandée pourquoi il avait, dans son autre main, une torche allumée, et ce en plein jour. Mais elle s'en souciait peu maintenant, et sa mère lui avait souvent répété qu'elle devait cesser de se questionner sur tout et sur rien.

"Mais où est-ce qu'elles poussent, ces fleurs?" D'ailleurs, en avait-elle jamais vu une seule? Elle connaissait pourtant ces lieux comme le fond de sa poche, ou du moins si elle avait eu une poche, elle les aurait connus comme le fond de celle-ci. Elle poursuivait sa quête avec acharnement, comme si elle cherchait le Saint-Graal, mais sans succès.

C'est à ce moment qu'elle aperçut un visage familier, derrière le flanc d'une colline. "Maman? Qu'est-ce que tu fais ici? Je ne la trouve pas ta fleur!" Elle entreprit de marcher vers sa mère, lorsqu'elle fut saisi par un horrible spectacle. L'homme qu'elle avait entrevu plus tôt avait substitué sa torche pour la tête de sa mère. Il portait, comme tous les autres avec lui, un casque orné de cornes et ses yeux étaient si sombres qu'on aurait dit le plus profond des gouffres. Sans dire mot, il s'avança vers la fillette, si terrorisée qu'elle ne pouvait plus faire le moindre mouvement. En tombant sur le sol, celui même que ses pieds avaient foulé plus d'une fois, elle vit une fleur bleue au loin... Belle et fougueuse, la fleur sauvage observait, impuissante, le spectacle cruel qui s'offrait à elle. Entre le ciel sévère et le sol ébouriffé, elle restait debout, en silence.

La douleur passe, la beauté reste.

Pierre-Auguste Renoir

dimanche 7 décembre 2008

Le lit

Ce lit paraît très petit. Pourtant, il est très grand. Il paraît si petit qu'on pourrait à peine croire qu'une personne peut s'y coucher confortablement. Pourtant, il est assez grand pour deux... pour trois... pour quatre... pour cinq... pour six personnes qui rêvent de choses différentes. Assez grand pour tous les personnages de leurs rêves, pour tous les paysages de leurs rêves, pour toutes les actions de leurs rêves, assez grand peut-être même pour sept... sept rêveurs.

Le septième rêve à une armée. Une grande armée, épuisée d'un combat lassant. Elle se battait sur six fronts: la terre, la mer, les airs, l'espace, le soleil et l'Espagne. Elle combattait au sujet d'un homme, le plus bel homme qui soit, le splendide Hélène de Troie, jadis Spartacus. Cette armée avait besoin de repos. Elle hésitait à se coucher dans le lit, qui paraissait si petit. Pourtant, il était assez grand pour une armée, pour Hélène, pour la terre, pour la mer, pour les airs, pour l'espace, pour le soleil et pour l'Espagne et pour six, ou même sept, rêveurs.

Ce lit paraît très petit. Pourtant, il est très grand. Si grand qu'on peut y déposer un oreiller, une tête et des rêves. Si grand qu'on peut y déposer une personne, autour de laquelle il est possible de déposer un bras. Si grand qu'on peut y déposer sa vie, autour de laquelle il est possible de déposer son sommeil.

lundi 1 décembre 2008

Le retour des singes guerriers


La légende raconte qu'il y a bien longtemps existait une tribu d'indiens dans laquelle les hommes se transformaient en terrible singe durant la nuit; leur force se décuplait, leurs sens devenaient plus fins et leurs réflexes passaient à un niveau supérieur à la moyenne. Malheureusement, cette transformation avait un prix: les couilles des singes guerriers devenaient si énormes qu'ils ne pensaient qu'à baiser. Leurs incroyables pouvoirs devenaient alors totalement obsolètes. Les singes guerriers étaient corrompus par le goût de la chair.

Afin de régler ce problème, les chefs de la tribu décidèrent de castrer les hommes qui seraient appellés à se transformer en singes la nuit venue. Ils ne conservaient chaque génération que deux hommes aptes à la reproduction. Ainsi, la tribu devint puissante et remporta de nombreuses guerres.

Jusqu'au jour où les deux derniers indiens féconds, Jean-Charles et André (dit Dédé), tombèrent follement amoureux l'un de l'autre: c'était l'avénement de l'homosexualité. C'est ainsi que la tribu des singes guerriers disparut. Pourtant, il est dit que lors d'une belle nuit d'été, les deux indiens encore féconds se transformèrent en singe, baisèrent comme des bêtes et s'endormirent ensembles, une dernière fois...

lundi 18 février 2008

L'osti d'mal de tête.

Osti que je suis tanné de c'te mal de tête là. Celui qui fait que toutes les lumières deviennent aussi brillantes que des néons. Le même aussi qui fait que j'ai envie de dégueuler, que j'suis fatigué après avoir dormi. Celui-là que je pogne toujours après la job, avant de sortir ou pendant que j'suis devant un écran.

Osti que j'suis tanné de c't'osti de mal de tête là. T'sais le mal de tête qui fait que j'arrive juste à t'imaginer à moitié pis que j'me force pour voir ton image. Pis que c'est tes yeux que j'veux voir mais que j'vois juste ta bouche. L'osti de mal de tête qui fait que j'te rêve à moitié, que j'te désire à moitié. Celui-là qui fait que j'taime à moitié. Le mal de tête qui fait que j'pourrais pas t'embrasser parce que j'viens de dormir pis j'ai encore la gueule pâteuse.

Osti que j'suis tanné de c't'osti de mal de tête là. Pis osti que j'suis tanné de chialer sur mon osti de mal de tête.

vendredi 1 février 2008

La mort

... ça fait quoi de mourir..?

Ben... au début il paraît que tu vois... c'est comme une longue spirale avec plein de couleurs. Les daltoniens eux c'est comme une longue spirale avec des formes. Si t'es aveugle tu vois rien, c'est pas comme si y allaient commencer à voir juste parce qui meurent.

Quand t'es rendu au bout du tunnel, c'est parce que ton âme est sur le bord de sortir de ton corps. C't'à peu près au même moment que les sphincters de ton corps se relâchent pis que tu souilles l'endroit d'où c'est que t'es mort. Mais c'pas grave, quand t'es une âme ton corps a plus d'importance. Tu te souviens même plus de quoi t'avais l'air... y paraît. La seule chose que tu sais, c'est de quoi les autres avaient l'air.

T'arrêtes pas de revoir ceux que t'aimais, en succession, comme des flashs d'appareil-photo; t'as pas le temps de les distinguer, mais tu les vois. Tu vois tout le monde, sans exception. Ils repassent devant tes yeux... tes yeux d'âme ou quelque chose du genre. Quand ça fait trois ou quatre fois que t'es a revus, tout devient noir, d'un coup. Pis là...

... Qu'est-ce qu'il y a après..?

J'sais pas, y'a personne qui est mort jusque là.

samedi 26 janvier 2008

La déprime

Je me suis levé tranquillement à matin. Le lit était encore imprimé sur moi, encore chaud sur moi. Le soleil m'a dit bonjour, tendrement; il m'a servi le petit déjeuner au lit. L'air se respirait bien. L'ombre sur le plancher n'était pas froide et je marchais lentement vers le bonheur d'un matin parfait, ensomeillé mais souriant.

C'est alors que je me suis pété le &%/"!! de p'tit orteil sur la **?"!/"""&&$ de table dans le salon. Le rêve s'est effondré, la réalité m'a projeté dans son précipice. Ça puait, j'avais une envie de pisser sévère et qu'est c'est que j'faisais debout à c't'heure-là... c'est une journée de congé maudit épais.

La deuxième fois que je me suis réveillé, le soleil m'avait abandonné, j'avais mal à tête et j'étais encore seul...

dimanche 13 janvier 2008

Le vent dans la ville

"Qu'essé tu racontes?" "J'te jure que quand y pleut ça arrive souvent qui vente en même temps."

"Tu penses?" "Ben oui... sinon comment tu ferais pour toujours recevoir d'la pluie dans face?"

J'ai pu rien à y dire, est bouchée criss. C'est quoi qu'à va me sortir après? Que c'est à cause de la ville qui vente pendant qui pleut? Que les immeubles créent un genre de vortex qui engendre des corridors de vent dans le milieu des rues? C'est n'importe quoi. J'ai jamais rien à y dire de toute façon, à comprend rien, est conne.

"C'est quoi? Y t'ont pas appris le français à l'école ostie d'épaisse? Faut tu j'te le dise en formule mathématique? Pluie = Vent, c'pas compliqué me semble."

M'a ben t'insulter si ça m'tente. Je l'sais que j'ai raison. C'est pathétique, je suis toujours en train de m'obstiner avec elle sur des trucs logiques, sur des affaires prouvées. C'pas comme si j't'ai en train de lui parler de mes émotions, là y'aurait moyen qu'on discute. La pluie ça tombe presque jamais droit, quand c'est le cas, c'est à cause qui pleut pas assez pour que ça vaille la peine qui vente. Pourquoi le vent y se déplacerait quand y'est même pas sûr qui pleut?

Ça donne rien de parler avec une fille. C'est comme parler avec un robot qui est programmé pour te faire chier pis pour dire le contraire de toi. C'est comme parler à un poster de Tom Cruise. J'essaye même pu, c'toute des ostis de conn...

"J't'aime mon amour." "Ouin, moi si..."